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Qu’est-ce qu’une espèce exotique envahissante (invasive) ?

Voici un petit rappel de quelques notions pour comprendre la thématique des espèces invasives :

Commençons par le début…

Pour se repérer dans son environnement, l’Homme a besoin d’identifier ce qui l’entoure. Pour ce faire, il attribue des mots à ce qu’il observe. Il identifie la nature comme un ensemble, composé de phénomènes (vents, marées etc.) et de matière vivante (êtres vivants). Il constate également que la nature est un ensemble dynamique qui évolue dans le temps et l’espace. En effet, depuis la nuit des temps, les êtres vivants transportent volontairement ou de manière fortuite, d’autres êtres vivants (des graines, des spores de champignons, des virus, des bactéries ou d’autres espèces animales ou végétales). L’Homme étant une espèce animale, il transporte de manière régulière d’autres espèces.

La thématique des espèces invasives a été créée par l’Homme depuis qu’il a constaté que les relâchés volontaires ou involontaires de spécimens vivants (animaux, végétaux etc.) dans le milieu naturel étaient plus fréquents et pouvaient entraîner des impacts sur la nature, la santé humaine voire l’économie.

De nombreuses études montrent qu’une espèce animale ou végétale arrivant « trop rapidement » dans son nouvel environnement  (en général déjà perturbé par une pollution, une destruction des habitats naturels) peut avoir des effets plus ou moins marqués sur la nature (biodiversité). Les introductions d’espèces par l’Homme, se sont vues amplifiées depuis que l’Homme a  développé considérablement des moyens de transport, permettant ainsi de nombreux échanges à travers le monde (mondialisation).

Est-ce qu’une espèce introduite est automatiquement invasive ?

Non, ce n’est que lorsqu’une espèce introduite dans la nature rencontre des conditions favorables à son implantation, qu’elle se naturalise (c’est-à-dire qu’elle peut se reproduire de manière autonome sans intervention humaine) et qu’elle prolifère tout en étendant son aire de distribution (cas par exemple du Ragondin ou du Frelon asiatique, ou du Moustique tigre) qu’elle peut devenir invasive. En général cette espèce peut avoir des effets plus ou moins marqués sur les milieux naturels ou sur d’autres espèces. On parle alors « d’espèce exotique envahissante » = EEE (ou d’espèce invasive). Il faut rappeler que c’est également un abus de langage de dire qu’une « espèce » est invasive. En effet, il s’agit d’individus d’une espèce ou des populations d’une espèce qui développent un caractère invasif sur un territoire donné. Ce n’est pas l’espèce dans son ensemble.

La définition de la Stratégie européenne relative aux espèces exotiques envahissantes (Conseil de l’Europe) définit une espèce exotique comme une espèce, sous-espèce ou un taxon de rang inférieur, introduit hors de son aire de répartition naturelle, passée ou présente. L’introduction ou la propagation menace la diversité biologique (Genovesi & Shine 2003). La définition inclue toutes les parties, graines, œufs ou propagules d’espèces de ce type qui pourraient survivre et se reproduire (Genovesi & Shine 2003). Le règlement européen n°1143/2014 précise qu’une espèce «espèce exotique envahissante» est une espèce exotique dont l’introduction ou la propagation s’est révélée constituer une menace pour la biodiversité et les services écosystémiques associés, ou avoir des effets néfastes sur la biodiversité et lesdits services.

Schéma explicatif du phénomène d’invasion

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L’entrée première à ces définitions porte sur les effets négatifs sur la biodiversité, la santé humaine ou l’économie. Néanmoins, des publications montrent que certaines espèces introduites et considérées comme invasives peuvent aussi être bénéfiques pour d’autres êtres vivants, par exemple, des espèces végétales mellifères, des espèces animales procurant une source de nourriture pour d’autres espèces (Otonello et al. 2005, Ruiz et al. 2002). Afin de proposer des mesures de conservation les plus adéquates à une situation donnée, il est important de prendre en compte différents critères relatifs au fonctionnement d’un écosystème ou d’une chaîne trophique pour identifier les effets induits par l’introduction d’un nouvel « élément » dans un système existant.

Enfin, un autre critère lié au phénomène d’invasion est l’absence de régulateur naturel où se situe l’espèce en question. Aussi, si on résume : un milieu naturel perturbé + une introduction d’une nouvelle espèce (individus ou populations) sur un nouveau territoire – son régulateur naturel = effet plus ou moins marqué de l’espèce introduite sur les autres espèces et les milieux présents d’un territoire donné.

Est-ce qu’une espèce invasive reste invasive toute sa vie ?

Une espèce identifiée comme invasive peut ne plus l’être au cours du temps. En effet, il s’écoule un temps plus ou moins long avant que l’équilibre naturel se fasse entre les êtres vivants (régulation par des espèces indigènes, phénomènes propre à l’espèce, changements environnementaux).

Aussi, afin de limiter certains effets de ces espèces sur la biodiversité ou la santé, des mesures sont mises en place pour enrayer le phénomène d’invasion (par exemple par une gestion des espèces par l’Homme ou la mise en place de réglementations), mais parfois, il suffit d’attendre un peu pour que l’invasion se calme. Néanmoins, cela ne signifie pas qu’aucune action ne doit être menée. En effet, les études scientifiques montrent que les invasions biologiques ont des impacts plus forts dans les îles car les taux d’endémisme (espèces que l’on ne trouve qu’à un endroit précis) sont plus fort et la moindre perturbation peut avoir des effets notables sur la biodiversité de ces îles. D’autres phénomènes, moins visibles comme l’introgression génétique (transfert de gènes d’une espèce vers le pool génétique d’une autre espèce, génétiquement assez proche pour qu’il puisse y avoir interfécondation) peut avoir des conséquences importantes sur la préservation d’un patrimoine génétique parental (cas de certaines grenouilles introduites ou oiseaux).

Que peut on faire pour éviter ces invasions  ?

L’enjeu est de taille pour conserver la nature proche de sa naturalité afin d’assurer une dynamique équilibrée du vivant. Il est donc primordial de changer nos comportements au quotidien (éviter de relâcher ou d’abandonner des espèces que l’on possède, réfléchir au choix des animaux ou des plantes que l’on achète ou que l’on transporte, nettoyer son matériel (sacs, chaussures) avant de voyager dans un autre pays, sensibiliser le plus grand nombre autour de soi. L’action préventive est le meilleur remède pour limiter les introductions d’espèces susceptibles de devenir invasives.

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Quelques définitions 

ESPECE : il existe de nombreuses définitions mais celle la plus communément utilisée est la suivante : il s’agit d’un groupe d’individus capables de se reproduire entre eux et avoir une descendance viable  (Ernst Mayr 1942). Pour se repérer dans son environnement, l’Homme donne des noms aux êtres vivants pour les identifier et les classe selon des critères similaires (taxonomie). Cette notion d’espèce est donc basée sur une réalité biologique en perpétuelle évolution. Pour plus d’information sur la notion d’espèces, cliquez ici.

ESPECE INTRODUITE : taxon (espèce, hybride, OGM etc.) non indigène libéré intentionnellement ou accidentellement dans un territoire ou une partie du territoire où elle était jusqu’alors absente. Une espèce allochtone introduite, reste au titre d’introduite, tant qu’elle ne parvient pas à se maintenir dans son nouvel écosystème, du fait d’une reproduction insuffisante (Williamson et
Fitter 1996).

ESPECE NATURALISEE : èspèce introduite rencontrant des conditions écologiques favorables à son implantation durable dans le temps et sur le territoire d’accueil. Son établissement est indépendant de l’Homme. Elle se reproduit régulièrement dans sa nouvelle aire géographique et se maintient à long terme » (Williamson & Fitter 1996, Richardson & al. 2000, Pascal & al. 2006).

ESPECE PROLIFERANTE : multiplication rapide du nombre d’individu : prolifération d’algues ou de pucerons par exemple (Rey & Rey 2010). Espèce qui se reproduit, dans un premier temps, sur un territoire qu’elle occupe et qui devient, dans un second temps, hyper-dominante sur ce même territoire. Ce phénomène est souvent lié aux activités humaines [arrêt de contrôle de populations, mise à disposition de nouvelles sources alimentaires, monoculture, élimination des prédateurs] (comm. pers. Chapuis 2010, Boudouresque 2012, comm. pers. Tabacchi 2013). Le terme d’espèce proliférante peut s’appliquer à une espèce autochtone ou allochtone.

ESPECE EXOTIQUE ENVAHISSANTE (INVASIVE) : la définition de la Stratégie européenne relative aux espèces exotiques envahissantes (Conseil de l’Europe) définit une espèce exotique comme une espèce, sous-espèce ou un taxon de rang inférieur, introduit hors de son aire de répartition naturelle, passée ou présente. L’introduction ou la propagation menace la diversité biologique (Genovesi & Shine 2003). La définition inclue toutes les parties, graines, oeufs ou propagules d’espèces de ce type qui pourraient survivre et se reproduire (Genovesi & Shine 2003).

Pour plus d’information sur les définitions, cliquez ici

Boudouresque C-F. 2012. Prolifération d’espèces et invasions biologiques. Salon des métiers et des professionnels de l’Ecologie. 38p. Téléchargé le 18/04/2013.
Genovesi. M-P. & Shine C. 2003. Stratégie européenne relative aux espèces exotiques envahissantes. Version finale. Convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe. Comité permanent. 23e réunion. Strasbourg : 50p
Ottonello D., Salvidio S. & Rosecchi E. 2005. Feeding habits of the european, pond terrapin Emys orbicularis in Camargue (Rhône delta, southern France). Amphibia-Reptilia, 26: 562-565.
Pascal M., Lorvelec O., Vigne J.-D., 2006. Invasions Biologiques et Extinctions : 11 000 ans d’histoire des Vertébrés en France. Coédition Belin – Quæ, Paris : 350 p.
Rey A., & Rey J. 2010. Le nouveau Petit Robert, Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française. Version numérique, nouvelle édition du Petit Robert.
Richardson D-M., Pysek P., Barbour M-G, Panetta F-D., Rejmanek M., Wests C-J. 2000. Naturalization and invasion of alien plants: concepts and definition. Diversity and Distributions 6: 93–107.
Ruiz Olmo, J., Jiménez, J., Palazón, S. & López-Martin, J.M. 2002. Ecologie et conservation de la loutre (Lutra lutra) et du vison d’Europe (Mustela lutreola) en milieu méditerranéen in: Chapron, G. & Moutou, F. 2002. L’étude et la conservation des carnivores. Société Française pour l’Etude et la Protection des Mammifères. Paris. 167 p.] : 104-112.
Williamson M-H. & Fitter A. 1996. The character of the successful invaders. Biological Conservation 78 (1996): 163-170.